Les ESAT, Établissements et Services d’Aide par le Travail dédiés à l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap, jouent un rôle clé dans l’inclusion et le maintien dans l’emploi de publics vulnérables. Outre leurs missions alliant emploi, lien social et santé, les ESAT ont également un rôle économique au cœur d’un territoire, en tant que prestataires d’entreprises locales dans le milieu ordinaire du travail. Ils sont confrontés à des enjeux spécifiques en matière de conditions de travail. C’est ici que la QVCT en ESAT prend toute sa dimension. Non seulement elle améliore le bien-être des équipes encadrantes, mais elle assure également un environnement de travail adapté pour les travailleurs en situation de handicap.
Réglementation et spécificités de la QVCT en ESAT
Les ESAT permettent à des personnes en situation de handicap pour lesquelles il est difficile de travailler en entreprise, d’exercer une activité professionnelle et de bénéficier d’un soutien médico-social. Avec la loi du 18 décembre 2023 dite loi pour le Plein emploi, les travailleurs en situation de handicap d’ESAT bénéficient de nouveaux droits individuels et collectifs les rapprochant ainsi des salariés « classiques ». Contrairement à ces derniers dont l’activité est régie par le Code du Travail, les travailleurs en ESAT ont un statut spécifique régi par les règles du Code de l’action sociale et des familles, lequel formalise la relation entre l’usager et l’ESAT. Ils conservent leur protection spécifique relative à leur statut particulier d’usagers d’un établissement social et médico-social (ESMS). Dans le cadre du Plan de transformation des ESAT, initié en 2021 par le gouvernement, un décret majeur a été publié le 13 décembre 2022. Ce décret apporte des changements significatifs dans la gestion et l’accompagnement des travailleurs handicapés en ESAT, renforçant les obligations des établissements en matière de qualité de vie et conditions de travail.
Les principaux engagements pris par ce décret consistent à :
- Favoriser une dynamique de parcours : le décret met en place un carnet de parcours et de compétence. Cet outil de suivi de validation des acquis permet aussi aux travailleurs d’ESAT de s’exprimer sur leur avenir ( formation, changement d’ESAT, d’atelier ou souhait de tester le travail en entreprise adaptée ou ordinaire.
- Étendre les droits sociaux pour les travailleurs handicapés : droits aux congés exceptionnels pour des événements familiaux (décès d’un proche, PACS, mariage, naissance…), congés liés à la naissance (maternité, paternité, grossesse pathologique…) ou encore congé de proches aidants, nouvelles règles sur la rémunération et les repos compensateurs en cas de travail un jour férié ou un dimanche. Enfin, les travailleurs d’ESAT peuvent compter désormais sur un délégué chargé de les représenter auprès de la direction.
- Prendre en compte la QVCT comme levier stratégique dans le fonctionnement des ESAT : une nouvelle instance de représentants des usagers et de représentants des salariés est instituée. Elle a pour rôle d’émettre des avis et de formuler des propositions en matière de qualité de vie au travail, d’hygiène et de sécurité, d’évaluation et de prévention des risques professionnels.
Étapes clés pour adapter la QVCT aux spécificités des ESAT
1. Diagnostic initial
Le diagnostic est une étape cruciale pour comprendre les besoins spécifiques des travailleurs en situation de handicap et des équipes encadrantes. Il s’agit d’évaluer les contraintes liées à chaque poste, les aménagements nécessaires et les attentes des bénéficiaires. Des outils comme les enquêtes de satisfaction et les entretiens individuels permettent de recueillir des données précieuses. En les complétant par une observation des tâches et du travail réel ( versus le travail prescrit ), nous obtenons un état des lieux à la fois qualitatif et quantitatif et une photo à l’instant T plus réaliste.
2. Formation et sensibilisation
Les équipes encadrantes jouent un rôle fondamental dans la réussite de la démarche QVCT. La formation des encadrants aux enjeux spécifiques de la QVCT dans un environnement médico-social est essentielle. Une équipe sensibilisée à la QVCT est plus réactive face aux signaux de mal-être et sait adapter son mode de management. Cela va de la sensibilisation à la démarche et à ses enjeux jusqu’à la prévention des risques psychosociaux ou l’acculturation à de nouveaux modes de management.
3. Mise en place d’actions concrètes
Les actions peuvent varier selon les besoins identifiés lors du diagnostic. Il peut s’agir de l’adaptation des postes de travail (ergonomie, rythmes de travail) ou de la création de moments de décompression pour les équipes. L’aménagement de « zones calmes », par exemple, peut permettre de réduire les tensions entre les travailleurs et leurs encadrants et d’éviter la dégradation des relations en conflits. L’instauration d’espaces de discussion sur le travail permet aux travailleurs d’ESAT et à leur éducateur ou moniteur de partager leurs avis sur une situation et de faire remonter de façon officielle des points de douleur dans leur quotidien.
4. Évaluation continue
Une fois la démarche QVCT enclenchée en ESAT, il est important de l’évaluer régulièrement. Des outils de suivi, comme des tableaux de bord ou des indicateurs de bien-être, permettent d’ajuster les actions mises en place. Les chantiers identifiés comme proritaires seront lancés et suivis par le comité de pilotage paritaire. Une démarche QVCT se mène de façon itérative en testant, en évaluant et, le cas échéant, en réajustant la solution choisie pour qu’elle porte tous ses fruits : plus de cohésion, une meilleure communication, une vision partagée et un travail qui a du sens…
Pourquoi la QVCT est un levier stratégique pour les ESAT ?
« Outre une rémunération, les personnes trouvent au sein de l’ESAT un lieu d’échanges et de partages vecteur d’une intégration sociale. Le confinement lié à la crise sanitaire a démontré l’importance du cadre du travail pour les personnes en situation de handicap. L’ESAT permet d’établir des relations humaines et propose des repères, favorisant ainsi une meilleure santé mentale en adéquation avec leurs préoccupations quotidiennes. » ( Le droit au travail pour tous, KPMG, 2021 )
Les établissements comme les ESAT ont tout intérêt à adopter la QVCT, car elle constitue un levier stratégique pour améliorer la qualité du service rendu et le bien-être de leurs travailleurs. L’implication des équipes encadrantes est essentielle dans cette dynamique. Elles permettent d’instaurer un climat de confiance, nécessaire pour que chaque travailleur en situation de handicap puisse lui aussi exprimer ses besoins spécifiques. Par ailleurs, la prévention des risques psychosociaux (RPS) et le soutien psychologique apporté aux équipes contribuent à maintenir une bonne santé mentale collective.
La QVCT est un outil précieux pour les ESAT, qui leur permet non seulement d’améliorer les conditions de travail de leurs équipes, mais aussi d’assurer un accompagnement de qualité aux personnes en situation de handicap. En investissant dans des démarches QVCT, les ESAT créent des environnements de travail encore plus inclusifs et performants, tout en renforçant leur mission sociale.
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